Bernard et Catherine Desjeux Journalistes - Reporters - Photographes
 
France : "Paroles de Nègres", Amadou Gaye dit sa vie.
 

Paroles de Nègres : Amadou Gaye dit sa vie.

Nous avons rencontré Amadou quelque part du côté de Sancerre, au cours d’un improbable vernissage dans la campagne berrichonne. Des gens bien intentionnés lui avaient dit : « Tu devrais rencontrer les Desjeux ». Pour une rencontre, s’en fut une. Entre deux verres de l’ami vigneron Daniel Chotard, un nectar de première, il nous déclina un poème, tout à trac sous les étoiles : « Les morts ne sont pas morts... » Nous eûmes l’impression de nous connaître depuis longtemps, d’avoir cheminé sur des chemins parallèles, nous nous sommes revus à la maison, en Sologne. Il apporta des tirages photos un peu en vrac : des instants de vie partagés dans les bistrots de Ménilmontant, dans le quartier de Château Rouge, quelques rencontres : Manu Dibango, Fellag, Harlem Désir, le sourire lumineux d’une femme, un petit baiser... Nous en ferons le livre « Paris la douce », avec, si l’on peut dire, la bénédiction de Josiane Balasko : « C’est marrant, t’es un black avec un accent de titi ». Notre fille Claire fera la maquette. Nous découvrirons vraiment Amadou au cours de son spectacle « Négritudes », puis aujourd’hui « Paroles de Nègres ». Incroyable comme il est habité par ces textes ! Lui, le Nègre à l’éternelle couvre-chef, joue avec des mains blanches, noires ou rouges, refuse l’exotisme, se cabre, crie pitié... Le noir n’est pas une qualité en soi, le noir n’est pas un état, c’est une image avec laquelle il doit vivre en positif ou en négatif, une image qui se reflète dans le miroir de la vie, une image qui existe dans la magie des mots. Il s’amuse, ne joue pas, il est. Un peu cabossé, Amadou vit avec les cicatrices de la vie pour compagnes, voit la vie dans un immense éclat de rire par-delà les mesquineries du quotidien. Amadou n’est pas dans le ressentiment, il est ailleurs, en voyage au bord des larmes et du bonheur. Un bras d’honneur joyeux qui rejoint « le Nègre vous emmerde » de Césaire, le copain du coolie de Hanoï et du docker de Suez. Ses photos sont des poèmes, ses poèmes des photos : instantanés permanents. Comme un musicien de jazz, il plaque des accords entre majeur et mineur, toujours les mêmes, jamais identiques. Yes he can, yes we can. Ensemble... Merci Amadou.

Catherine et Bernard Desjeux

 
 
 

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