Bernard et Catherine Desjeux Journalistes - Reporters - Photographes
 
Le Mali face à lui-même
 

Nous avons rencontré le Mali pour la première fois au début des années 80, et nous y sommes revenus à de nombreuses reprises, tissant des liens d’amitié très forts qui perdurent.
Le Mali, depuis une dizaine d’années, était souvent présenté comme un modèle : dès le XIIIe siècle, l’empereur Sundjata Keïta y a façonné une civilisation du « vivre ensemble ». Le fleuve Niger, cœur du Mali, voyait cohabiter les populations d’éleveurs, d’agriculteurs et de pêcheurs. Il a fallu - à la stupeur générale - un coup d’État venu d’un autre âge pour que l’État malien s’effondre comme un château de carte.

À cela plusieurs raisons :

Le contexte international : Depuis plusieurs années, l’Afrique de l’Ouest est rongée par des guerres intérieures qui permettent le développement du grand banditisme, notamment chez les voisins directs : Guinée et Côte d’Ivoire. De nombreux Maliens en furent chassés sous prétexte d’ivoirité, créant des déséquilibres économiques et démographiques.

Un contexte intérieur : La démographie galopante modifie considérablement les possibilités du pays à faire vivre ses enfants. Environ 400 000 petits Maliens naissent chaque année (l’équivalent de Nantes) sans voir les ressources augmenter en conséquence. Il s’ensuit une paupérisation croissante et un mal vivre, sources de délinquance pour une population ayant à 80 % moins de 20 ans. De plus le delta intérieur du Mali cœur du pays risque de disparaître sous les coups de boutoirs d’aménagement intempestifs.

Le tourisme a semblé un temps être une opportunité de développement intéressante, sur les plans économique et, surtout, culturel. Mais hélas la France a cru bon de déconseiller les régions du nord dont c’était, avec l’aide internationale, la principale ressource. Le Mali devient aussi, en quelques années, le lieu de nombreux trafics : clandestins, armes, prises d’otages et, surtout, drogue. La corruption s’y développe de manière considérable, pourrissant tous les rouages de la société, y compris politique. Puis les événements de Libye favorise le déclenchement du drame.>br>

C’est dans ce contexte que le Mali s’effondre, sous les coups de boutoir à la fois de groupes islamiques liés à Aqmi (Al Quaeda au Maghreb islamique) et d’un groupe touareg baptisé MNLA qui décréta avec une belle inconscience et sans concertation aucune avec les populations l’État indépendant de l’Azawad.

Reste le peuple malien, meurtri dans sa façon même de vivre, incrédule devant les manifestations de haine et de violences inimaginables. Reste le peuple malien, seul maître de son destin.
Bernard Desjeux

Livres : l’Etat démocratique républicain, la problématique de sa construction au Mali, Abdoulaye-Sékou Sow, éditions Grandvaux Mali de Catherine et Bernard Desjeux éditions Grandvaux

 
 
 

© Bernard et Catherine Desjeux Journalistes - Reporters - Photographes
http://bernard.desjeux.free.fr

Retour à la page précédente