Bernard et Catherine Desjeux Journalistes - Reporters - Photographes
 
le process du business in Africa, Africadays HEC Paris
 

le process du business in Africa

C’est la première fois que je pénètre sur le Campus de cette école. Disons le je suis venu un peu pour ça, pour voir comment est un campus. Celui-ci n’a pas grand chose à voir avec celui de mes études lointaines à Nanterre. Les murs étaient couvert d’affiches, de slogans "ici on spontane " "A travers Crozier nous retrouvons notre vielle ennemi la marchandise " etc... Ici tout est verticale, pas une courbe, des espaces verts sans mauvaises herbes, bien tondus, bien aménagés. De beau jeunes gens et de belles jeunes filles se baladent décontractés les mains pleines d’ordinateurs, tout en lisant un smartphone ou une tablette, il y a des écrans partout. Il se trouve que moi, pour des raisons un peu longues à développer, je n’ai pas de téléphone et je cherche désespérément la personne qui doit m’accueillir. Une jeune fille s’arrête "puis-je vous aider ?" je suis sauvé, damned ! elle a bien sûre un téléphone mais pas sur elle. Je suis tombé sur la seule qui n’est pas suréquipée.

Je crois être secouru par le fixe de la cafétaria, je tombe sur une messagerie, on me rappellera à ce numéro mais je ne serai plus la. J’ai installé finalement mes livres sur une table qui me semblait vide et tout s’est bien passé.

1er jour Lundi 15 mai 2017

Africa Days s’est ouvert par un grand débat en présence de Daniel Kablan Duncan° vice-président de la Côte d’Ivoire, Kako Nubukpo Directeur de la francophonie économique et numérique, organisation internationale de la Francophonie, ancien ministre du Togo, Mahamane Alassane Touré Adjoint au directeur des Opérations du marche BCEAO la modération étant assuré par Pascal Chaigneau professeur affilié HEC Paris. La synthèse de ce débat très consensuel a été assurée par Abdelmalek Alaoui journaliste CEO, tribune d’Afrique.

J’ai été frappé par la clarté, la précision des exposés la finesse du modérateur "qui aime l’Afrique" d’une façon générale et aussi toute personnelle.

On apprend les défis que l’Afrique doit relever parmi lesquels l’éducation, la santé, la transformation des matières premières, la lutte contre la corruption, le réchauffement climatique, que le CFA est en bonne santé "c’est comme une assurance, cela ne coûte cher qu’avant l’accident" insiste monsieur Daniel Kablan Dunkan. Donc oublions des contextes idéologiques ou historiques et utilisons cet outil d’une monnaie forte et convertible quelque soit son nom.

Il n’y a que 5% du revenu du cacao qui reste en Côte d’Ivoire premier producteur mondial, Idem pour la noix de cajou des liens ont été engagé avec le Vietnam premier transformateur de noix de cajou...La démographie va augmenté dans de grandes proportions, ce sera une richesse économique... très bien très bien mais quid du travail informel des femmes, qui du code des investissements les questions sont nombreuses.

Même si les exposés sont précis, argumentés de chiffres : la croissance exceptionnelle de la côte d’Ivoire presque à deux chiffres, les échanges avec la Chine et les pays émergents je suis frappé par le décalage qu’il existe entre cette salle bourrée de bonnes intentions. On sent tout le monde dans les starting block prêt à aller travailler, investir en Afrique.

J’entend ces discours depuis plus de quarante ans "quand l’Afrique s’éveillera", "L’Afrique le continent le plus riche du monde va décoller", "L’Afrique est un marché considérable tout reste à construire : des routes, des barrages, des aéroports, des usines pour donner du travail à tous ces jeunes qui débarquent d’on ne sait ou. Les logements deviennent trop petits, les villes explosent, les usines de ciments marchent à fond...Cette population est considérée comme un atout, faut voir.

Alors quoi de neuf ? Il me semble qu’une page est en train de se tourner. De jeunes diplômés restent au pays créent leur société. J’ai cru comprendre qu’HEC cherche à accompagner le mouvement.

Reste un décalage énorme entre ces discours bien ficelés et la réalité quotidienne. Je reviens d’un séjour en Guinée Conakry, j’ai mis 18h pratiquement sans nous arrêter pour relier la capitale à la ville de kan kan (7OOkm) par la principale route du pays complètement défoncée.

La Guinée est le premier producteur de Bauxite du monde.

J’ai poursuivi dans des villages plus reculés. Le moteur du bac ne marche plus, il faut monter la voiture et se mettre à l’eau pour pousser le bac, enfin pas "nous" le bacqueur.

La soirée s’est terminée par un cocktail, l’Afrique noire est bien partie.

à suivre

2ème jour mardi 16 mai 2017

Aller et venir sur ce campus, ce n’est pas de la tarte :marche à pied jusqu’à la gare du nord RER B, RERC, bus et quand vous êtes enfin arrivé il faut une stratégie de haut vol pour en ressortir à 10h et demi, plus de navette je trouve une voiture qui me drope à la défense.

Aujourd’hui le débat est sur l’entreprenariat en Afrique. Un peu surréaliste devant un panel de banquier et d’hommes d’affaires qui témoignent de leur success story la salle est pleine. Beaucoup d’africains, mon voisin est venu avec son CV, il espère une rencontre miraculeuse, une embauche qui permettrait de gagner un peu sa vie, il aimerait se faire construire une maison pour sa famille. Un ancien élève Christian Kamayou Fondateur de MyAfricanStartup parle des 100 meilleurs start up d’Afrique. Ici on a la culture du concours. D’autres intervenants rêve de lever des millions, de s’adosser à des groupes, d’écosystéme, de process, d’emprunts des femmes et des 65 milliards que la diaspora envoie chaque année en Afrique. Celle-ci mal orientée va surtout vers des dépenses de bouche et de santé. C’est vrai que se nourrir est accessoire. Un intervenant explique qu’on ne met pas assez de phytosanitaire en Afrique. J’ai écouté ce conseil : vous pouvez développer votre offre verticalement ou horizontalement comme l’Afrique a besoin de tout vous pouvez vendre de tout. Il y a cette jeunesse qui arrive en rangs serrés, c’est un marché formidable des millions et des millions de consommateurs vont se presser dans les usines du "neo mercantilisme" pour ceux qui n’étaient pas la hier, s’agit de transformer les matières premières. J’ai le tourni. j’hésite encore à créer ma startup et à me faire incuber. Lorsqu’un jeune marocain élève d’HEC avec l’audace de sa jeunesse décline avec un power point d’école, un projet autour de l’agriculture car le savez vous, il faut développer l’agriculture personne n’y avait pensé. En tous cas lui ce jeune avec quelques camarades ils ont fait un business plan pour aller enquêter sur la question pendant 6 mois il cherche un financement : si vous avez une idée...

Pour une Afrique verte : le défi de demain roulez jeunesse...

La semaine dernière en Guinée j’ai rencontré une équipe d’agronômes marocains qui venaient "aménager" des terres en bordure du fleuve Niger : pivots arroseurs, phytosanitaires, tracteurs de 80 CV de quoi flinguer toute une population et d’accélerer la déforestation et la désertification tout en ramassant un beau pactole. Quand on vous dit qu’il y a des opportunités en Afrique.

En tous cas je n’ai pas entendu parler ce qui est rare dans ces débats sur l’Afrique d’humanitaire et d’aides ou si peu. C’est très reposant.

Après deux petits fours et un verre de jus d’orange récolté in extremis au cocktail pris d’assaut par nos brillants élèves clôturant la soirée dans une ambiance "conviviale". Le premier a raison. j’ai réussi à rentrer en stop à Paris et d’attraper le dernier métro porte de Vincennes. Le quartier de la goutte d’or est endormi, les derniers cafés ferment, quelques jeunes finissent leur clope. Le poubelles sont pleines, un monsieur fouille dedans, les sans papiers installent leur cartons pour la nuit tant bien que mal.

Quel voyage !

J’y retourne demain, je sais comment y aller.

3éme jour
En indiquant 1er, 2ème, 3ème jour, j’ai l’impression d’évoquer un chemin de croix. Se rendre sur le campus d’HEC et surtout en revenir à plus d’heure est un vrai cauchemar. Pire que la route Conakry, Kankan !

C’est dans le RER que je côtoie cette diaspora, celle qui exporte 65 milliards dont on parlait hier. Je calcule que j’ai passé plus de temps dans ces foutus RER que devant ma table de livres. Ces livres que je ne peux vendre pour une raison qui m’échappe dans ce temple du business. Il faut bien le reconnaître cela n’intéresse pas beaucoup. Je vois défiler du beau monde mais leurs préoccupations vont ailleurs. Nous avons pourtant édité avec le PNUD de Côte d’Ivoire un important livre dont le préambule a été écrit par le vice président de ce pays, celui la même qui est à l’honneur. Ce livre contient 70 contributions d’experts de toute l’Afrique traitant de l’émergence et du développement durable de l’Afrique. Quand je le montre, j’ai l’impression de déranger. Il n’est jamais trop tard pour bien faire.

Mon offre n’est visiblement pas dans le segment du marché, j’ai pourtant une offre verticale qui va du beau livre, à des biographies dont celle de monsieur Younoussi Touré premier premier ministre de la démocratie au Mali, ancien président de l’assemblée nationale, directeur de la banque centrale qui est passé par la BCEAO et l’UEMOA... et qui dans le premier tome raconte son enfance de petits paysans dans la région de Tombouctou de leader étudiant à l’époque de Nkrumah Lumumba , Sekou Touré, Modibo Keita...

Tout ça c’est bien joli mais ce qui intéresse c’est semble-t-il ce continent qui va s’ouvrir aux marchés du monde entier, donc marketing, marketing.

Comment ont été choisis les stylistes qui constituent le panel du jour ? à cause de leur marketing. Vous aviez deviné.

Le débat est particulièrement intéressant car la parole des créateurs sonne vraie. Il n’y a pas incompatibilité entre les business plan et la création. Sakina Msa en sait quelque chose, elle pétille d’intelligence et de vie s’affirme comme une créatrice avant tout, sans renier l’Afrique et sans renier Paris ville de création, d’émulation.Elle a monté en plus de ses créations une boutique de mode éthique dans le marais à Paris avec 60 créateurs. Elle évoque son ami et ainé Lamine Xuli Bet grand créateur mondial qui a eu du mal à dépasser un certain stade de développement. Je suis impressionné par Nefer qui a travaillé pour de grande maison comme Smalto avant de créer sa propre marque Nefer, il crée des costumes sur mesure pour les grands de ce monde. Le prix : autour de 5000€. La présentatrice évoque sa surprise de voir dans ce panel l’anthropologue, Brice Ahounou. « C’est un sujet clef : se vêtir » Brice évoque de façon vécue et percutante le phénomène de la sape qu’il a contribué à relancé lors d’une exposition et un défilé au musée Dapper . Olivier Delahaye, cinéaste, producteur viendra présenter rapidement son film Soleils qui passe au Lucernaire un film pépite qui montre une Afrique débarrassée des visions exotiques. « L’Afrique a quelque chose à vous dire » ça tombe bien. Ce soir j’ai enfin récupéré la navette, je vais pouvoir atteindre le métro. Dans le bus j’engage la conversation avec mon voisin banquier de son état. Un résumé de ces trois jours passé en terre de business et de finances. J’ai l’impression de déjà connaître le film. Il m’évoque la dette de la France « je ne vois pas comment on va s’en sortir » je lui explique que c’est plutôt les créanciers qui ont des soucis à se faire. En fait le monde est dans un système de cavalerie ou tous les pays prêtent et empruntent, le japon 250% et l’économie est en surchauffe. « Il y a trop de fonctionnaires on vit au dessus de nos moyens » ben voyons il y a . trop d’infirmières, d’aides soignantes, de policiers, de juges, d’instituteurs, de professeurs, d’éducateurs de théâtres. Trop de solidarité, d’infirmes, de malades, de paumés...

il me semble que l’argent se trouve plus chez les riches que chez les pauvres.

Et puis il évoque la phrase de François Hollande, celle qui tue : « mon ennemi c’est la finance ». C’est vrai que pour un banquier cela fait mal, c’est son travail. Il me semble confondre investir et spéculer. "Lépargne ne rapporte plus rien" J’essaye de dire timidement que les préoccupations ne sont pas les mêmes et sont contradictoires l’un entasse de l’argent l’autre à un souci de service publique, de vivre ensemble, il n’a pas besoin d’argent pour lui mais pour les autres. Un président n’est pas un chef d’entreprise. Je sens que nous ne sommes pas tout à fait d’accord je lui explique que j’ai acheté un appartement dont le prix a été multiplié par 6 ou 7 en quelques années et que si je ne m’en plains pas cela ne me semble pas trop normal.

« Alors la, je ne vous suit plus », il a pris son sac nous étions arrivé Porte Maillot. Il ne m’a pas dit au revoir et doit fulminer contre ces soixante huitard qui ne connaissent rien à rien surtout pas la finance et parle de bonheur. Décidément la France est dans un état lamentable comment va t-on s’en sortir ? Tout le monde a ses soucis. Quand on est dans le cercle, on ne voit pas le rond.

Trois jours passés sur le campus d’HEC, l’état lamentable de la France ne m’a pas sauté aux yeux. On me dit que la scolarité coûte 45000 euros que pour un jeune Sénégalais qui voudrait faire une année de MBA c’est 18000 euros.

Ouvrez les fenêtres de l’air !

Bernard Desjeux

° Daniel Kablan Duncan° vice-président de la Côte d’Ivoire a écrit le préambule du livre "Sustainable development and the Emergence of Africa" paru aux éditions Grandvaux, préface de Monsieur Alassane Ouattara président de la République de Côte d’Ivoire. Ce livre était consultable sur la table des éditions Grandvaux à Africadays et bien sûre en vente dans" toutes les bonnes libraires".

 
 
  Bernard Desjeux présent à Africadays sur le campus d’HEC pour présenter les livres des éditions Grandvaux sur l’Afrique les 15-16-17 mai 2017

© Bernard et Catherine Desjeux Journalistes - Reporters - Photographes
http://bernard.desjeux.free.fr

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